Actuel – 11.04.2013

Tamedia, le masque tombe

Extraordinaire, la propension qu’ont certaines personnes à se renier. Ce trait de caractère trouve un environnement hospitalier dans le champ de ruines qui se profile après le tremblement de terre provoqué par Tamedia.

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

A l’annonce des 18 millions que le groupe zurichois entend économiser en Suisse romande, des observateurs n’ont pas manqué, avec à-propos, de revenir sur des  déclarations formulées il y a quelques années, juste après le rachat d’Edipresse par Tamedia. Ainsi en 2009, tel gourou de la presse romande s’ébaubissait devant la «grande expérience» de Tamedia en matière d’information régionale. Invité récemment sur le plateau du téléjournal, le même mentor ne tient plus le même discours. Il pousse des cris d’orfraie et s’étonne des mesures «irresponsables» qui «pressent le citron au risque de mettre en péril le métier».

Promesses. Parallèlement sur facebook tournent en boucle les propos du président du conseil d’administration de Tamedia, tenus en avril 2011 dans les colonnes de deux quotidiens lémaniques contrôlés par ce groupe. Dans cette interview, Pietro Supino dit toute la vénération que lui inspire le patrimoine médiatique romand. Le rachat d’Edipresse, assure ce visionnaire, aura un impact «plutôt positif» pour l’emploi car il implique des projets de développement en Suisse romande.

Comment croire, dès lors, les responsables zurichois et leurs séides lausannois quand ils affirment la bouche en cœur que la survie de tel ou tel journal n’est pas menacée. En réalité, la politique de Tamedia a toujours été celle du Panzer. L’éditeur alémanique l’a prouvé en 2005 lors du rachat de la «Thurgauer Zeitung», puis en 2007 lors de la reprise du groupe bernois Espace Media, regroupant le «Bund» et la «Berner Zeitung». Grandiose, Tamedia promettait son amitié et la diversité médiatique. Mais à chaque fois, le résultat a déçu: démembrement, revente, voire la mort subite ont été le lot des crédules victimes.

Gesticulations. Le masque tombe aussi sur les bords du Léman où l’on se demande ce que les politiciens vont pouvoir inventer pour empêcher Tamedia de réaliser ses sombres desseins. N’était le drame qui se joue pour des dizaines de journalistes, on poufferait de rire devant les gesticulations de l’un ou l’autre de ces virtuoses du verbe creux. Qu’ont-ils fait pour anticiper le cours des événements, malgré les mouvements d’alerte, livres et autres publications dénonçant l’info popcorn? Il est bien tard aujourd’hui.

Le 27 mars dernier, le Conseil fédéral désignait les treize membres qui formeront la Commission fédérale des médias, appelée à se pencher sur les problèmes de la branche. Cette structure ambitieuse tombe à pic mais elle devra agir très vite et d’abord prouver qu’elle est crédible. Un petit souci est de mise quand on jette un coup d’œil sur sa composition: elle ne compte pratiquement aucun journaliste.

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