Actuel – 15.06.2013

Offshore Leaks, le pourquoi du comment

Le tam-tam d’un marketing tapageur promettait beaucoup. Des milliers de documents envoyés à des fins limiers de la planète devaient permettre de débusquer les plus gros fraudeurs du fisc. Le résultat n’est pas à la hauteur des espérances. La cagnotte du défunt Günther Sachs est un tuyau percé. Quant aux fiduciaires du Liechtenstein, nous dire qu’elles sont des acteurs de l’évasion de capitaux participe de la réinvention de la roue.

 

PAR CHRISTIAN CAMPICHE

 

L’affaire Offshore Leaks s’assimilerait-elle à un pétard mouillé? EDITO+KLARTEXT s’est adressé à la cellule d’enquête du groupe Tamedia qui a reçu les documents de Washington. L’idée était de lui demander comment elle travaillait et d’abord qu’elle avait été sa réaction en recevant cette masse d’informations. Car là réside, à notre avis, l’enjeu véritable de ce cadeau descendu du ciel. Pourquoi tel média et non tel autre? Pourquoi inciter quelques dizaines de titres à sortir simultanément des informations qui concernent le tourisme fiscal, à un moment où les collectivités publiques tentent par tous les moyens de regarnir leur bas de laine? Peut-on soupçonner une quelconque manipulation? Mais les journalistes de la cellule ont refusé de s’exprimer. C’est dommage.

 

Apprenant que notre magazine organisait un débat sur le sujet, un enquêteur de la "SonntagsZeitung" a rédigé un texte, soit un Q&A (Questions & Réponses) fondé sur les critiques objectives qui pourraient être adressées au réseau d’investigation concerné par l’Offshore Leaks. Beaucoup de bruit pour rien? "Le thème Offshore figure à l’ordre du jour du G20 et de l’OCDE", objecte le journaliste. Des délits imaginaires? "Il est d’intérêt public de savoir que les fiscs vérifient les informations selon lesquelles la fortune de tel ou tel contribuable est gérée par un trust sis aux Bahamas", argumente-t-il. L’Offshore Leaks, un tigre de papier? C’est une mauvaise remarque, estime l’enquêteur, "l’éclairage a été jeté sur des avocats suisses qui aident à l’évasion fiscale. Il aurait été utile et très important qu’un leak dénonce en son temps ce que des banquiers d’UBS et de la banque Wegelin manigançaient aux Etats-Unis."

 

Légitimité. La légitimité démocratique? Le journaliste trouverait étrange de renoncer à l’exploitation de l’Offshore Leaks parce que l’on ignore le pourquoi du comment. Après tout, les médias choisis par les responsables du réseau d’investigation figurent parmi les journaux "les plus renommés au monde". Et puis "la presse a le devoir de porter à la lumière les affaires qui sont d’intérêt public".

 

 Sans doute. Mais dans un contexte aussi sensible, il eût été préférable de crédibiliser d’abord l’information en l’accompagnant d’un vade-mecum sur la méthode. On peut souhaiter par ailleurs que l’Offshore Leaks ne monopolisera pas ad aeternam l’énergie de journalistes dont le flair serait bien utile dans moult dossiers autrement délicats qui empoisonnent la planète.

 

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