Pour l’édition en allemand d’EDITO, des jeunes journalistes issus du MAZ, l’école du journalisme à Lucerne, ont rédigé une série d’articles.
Parmi eux figure ce plaidoyer de Jana Talos.
Je ne veux pas parler de la crise du journalisme. D’autres l’ont assez fait. Ma contribution devrait être bien davantage un discours de motivation. Pour tous les jeunes journalistes qui, comme moi, ont récemment achevé leur formation et sont depuis lors confrontés à la question: as-tu choisi le bon métier?
Non pas que je me pose moi-même cette question. Elle m’est surtout envoyé au visage. On me demande: «Est-ce que ça a encore un avenir, quand on peut tout lire gratuitement sur la toile?» Ou: «Aïe, une journaliste? Je dois faire attention à ce que je dis, sinon ce sera demain dans le journal. Avec vous on ne sait jamais, hein?»
«Ça me fatigue de devoir toujours expliquer pourquoi j’aime ce métier.»
J’ai rarement une réponse toute faite. «ça va», ou «je ferme mes oreilles», c’est souvent tout ce qui me vient sur le moment. Non que je partage leur avis, mais ça me fatigue de devoir toujours expliquer pourquoi j’aime ce métier et pourquoi je ne songe pas à faire autre chose dans un avenir proche. D’abord, pourquoi cette question? On ne demande pas à un cuisinier s’il est sûr de rester dans sa profession quand les gens mangent de plus de plats précuisinés et de fast food. Pourquoi devrais-je me justifier? Et de toute façon, qu’est-ce que ça apporterait d’expliquer en quoi ce métier me comble? Ces personnes changeraient-elles d’avis?
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Oui, peut-être le feraient-elles si je prenais le temps d’expliquer en quoi consiste le journalisme. Que ce n’est pas un job auquel on se rend à 8 heures et dont on s’extrait à 17 heures. Qu’on n’écrit pas simplement quelques lignes qu’on épice de fake news pour générer de l’attention. Qu’il s’agit de réunir des faits, d’exposer des liens, de suivre des processus. Que nous avons à soupeser, à mettre de l’ordre, et que nous en assumons la responsabilité.
Naturellement, ce n’est pas toujours facile. Nous sommes tous sous pression, pas seulement dans le temps, mais aussi à titre personnel. Des collaborateurs de longue date sont mis à la retraite et non remplacés. On nous répète constamment que la qualité ne doit pas en pâtir, que nous devons «travailler un peu plus efficacement» et faire «un peu plus d’efforts».
Cela vous tape sur l’esprit. C’est pourquoi il m’est si difficile, et peut-être pour nous tous, de défendre le journalisme devant les autres. Il est plus facile de ne rien dire. Mais nous devrions surmonter cela.
Oui, nous sommes en crise. Oui, il est actuellement difficile de trouver un poste stable. Mais j’en suis convaincue: tant qu’il existe une société humaine, il faut des gens pour raconter ses histoires. Et nous justement, les jeunes journalistes, nous avons acquis le savoir-faire, au cours de notre formation, afin d’emballer ces histoires dans de nouvelles formes, et de les rendre appétissantes pour nos lecteurs, téléspectateurs ou auditeurs.
Nous ne savons pas comment c’était autrefois. Nous ne connaissons que ce qui est maintenant. Alors utilisons cet avantage et regardons vers l’avenir. Mais surtout: montrons-nous plus enthou-siastes devant les autres – pour ce qui reste le meilleur métier du monde.
Jana Tálos
originaire du Seeland, est stagiaire à la rubrique locale du
Bieler Tagblatt.
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