"Dans notre société très médiatisée, les événements marquants, particulièrement quand ils sont chargés d’émotions, donnent lieu à de véritables "avalanches" d’articles ou d’émissions. De tels phénomènes "d’emballement" peuvent choquer, et ils méritent réflexion. L’ampleur du traitement peut se révéler disproportionnée, la surenchère peut conduire à un manque de prudence (…). Mais pour le Conseil de la presse, il ne faut pas perdre de vue que de tels phénomènes sont le corollaire de la liberté de la presse, dont l’importance politique et sociale n’est plus à démontrer…" (avis 22/2008).
Le Conseil de la presse l’a redit à plus d’une reprise: d’un point de vue déontologique, l’emballement médiatique n’est pas condamnable en soi. Mais son occurrence requiert de la part des journalistes une attention particulière. Dans le climat de surenchère dans lequel les médias peuvent alors se placer, les rédactions s’exposent au risque d’oublier certains fondamentaux. Même les rédactions réputées les plus sérieuses!
Qu’un golden boy soit accusé d’agissements sulfureux, et c’est à qui déterrera le plus de rumeurs graveleuses, parfois sans effectuer les vérifications d’usage. Ou sans prendre la peine de recueillir la position de la défense (avis 58/2010). Qu’un évadé dangereux coure la campagne, et c’est à qui ressortira les expertises ou les interviews les plus significatives, sans avoir conscience que les éventuels démentis de l’époque devraient être rappelés (avis 7/2012).
Est-ce à dire que les médias devraient s’abstenir d’enquêter sur des procédures judiciaires encore en cours? D’aucuns le préconisent, invoquant la présomption d’innocence. Telle n’est certainement pas la position du Conseil de la presse, pour qui les journalistes sont tout à fait légitimés à rechercher la vérité sans attendre un jugement officiel. Mais c’est alors qu’il convient de respecter le plus scrupuleusement les règles professionnelles.
L’auteur est journaliste et président du Conseil suisse de la presse.
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